Joëlle Ledent nouvelle enseignante en Lettres-Histoire-Géographie-EMC

 

Joëlle Ledent a rejoint le Lycée Darche en tant qu’enseignante de Lettres-Histoire-Géographie-EMC en septembre 2020. Nourrie de multiples expériences professionnelles d’enseignement et d’études vécues à travers l’Europe, cette nouvelle collègue a eu la gentillesse d’accepter notre invitation à un entretien afin de faire plus amplement connaissance avec elle. Témoignage très intéressant à retrouver ci-dessous…

 

 

 

 

 

 

 

RESSOURCES HUMAINES

 

– Bonjour Joëlle, d’où viens-tu ?

 

Je suis Belge ! Je viens de Belgique, on va commencer par là… (rires). Je viens de la région de Libramont et par la suite, j’ai vécu pendant plusieurs années du côté de Marche-en-Famenne, à Hotton exactement, sur les bords de l’Ourthe, entre Liège et Bastogne.

 

 

 

– Quelle est ta formation ?

J’ai suivi des études de « philologie romane » (l’équivalent des lettres modernes et de la linguistique en France) pendant quatre ans à l’université de Liège et par la suite, j’ai passé une agrégation centrée sur le FLE (français langue étrangère).

 

– Alors l’agrégation existe aussi en Belgique ?

L’appellation est la même mais les contenus y sont sensiblement différents qu’en France. Dans mon parcours de lettres modernes, je suivais une orientation intitulée : « littérature espagnole », ce qui m’a permis de décrocher la bourse Erasmus afin de passer une année d’études en Espagne, à Valladolid, au milieu des années 1990.

 

– Et qu’as-tu fait après ces études ?

Après l’obtention de mon agrégation, je suis partie pendant un peu plus de quatre ans en Italie, pour y occuper un poste de lectrice, d’une part à Messine pendant deux années et d’autre part à Ferrare (près de Bologne), à chaque fois en faculté de Lettres et de Sciences de l’éducation. Mon employeur était alors la Communauté française de Belgique qui a aussi comme principal objectif la diffusion de la culture francophone belge à l’étranger. On se retrouvait dans des villes où il n’y avait pas particulièrement un attrait pour la littérature belge ! Il fallait alors trouver d’autres « accroches » telles que le théâtre qui s’avère être un outil formidable d’apprentissage d’une langue étrangère. Pour le coup, on montait des spectacles de dramaturges belges (Michel de Ghelderode, Don Juan, ou encore Suzanne Lilar Don Juan) avec les étudiants et on les jouait devant différents publics dont des scolaires.

– Qui sont ces deux auteurs Michel de Ghelderode et Suzanne Lilar ?

Ce sont deux dramaturges belges du XXe siècle avec – pour Michel de Ghelderode – un théâtre de l’absurde qui s’inspire du théâtre de marionnettes et de masques. C’est un monument de la littérature belge d’origine flamande mais ayant été scolarisé et écrivant en français, comme c’était souvent le cas à l’époque.

Quant à Suzanne Lilar, beaucoup moins connue, elle est une dramaturge et romancière aussi d’origine flamande et publiant en langue française. Ces deux écrivains ont tous deux fait le choix d’écrire en français, donc dans une langue qui n’était pas leur langue maternelle !

– En quoi consiste la fonction de « lectrice » dans une fac ?

À la faculté des Lettres, le travail d’un lecteur ou d’une lectrice consiste d’une part, à donner des cours aux étudiants en français langue étrangère et d’autre part, des cours de littérature francophone. L’idée étant toujours d’élargir le champ au-delà de la seule littérature française de France.

 

– Et après ce passage en Italie ?

Retour en Belgique à Hotton pendant huit ans et là, j’ai travaillé dans une ASBL – l’équivalent en France d’une association de loi 1901 – c’était l’association « Lire et Écrire ». Il s’agissait d’une association visant à lutter contre l’illettrisme, à destination des adultes et qui donnait également des cours de français langue étrangère… À cette époque-là, parmi les apprenants de langues étrangères il y avait beaucoup de migrants issus des anciennes républiques de l’ex-URSS (Azerbaïdjan, Biélorussie, Ouzbékistan, Tadjikistan, etc.).

 

– Ces migrants étaient-ils motivés pour apprendre le français ?

Oui, bien sûr ! D’une part parce qu’ils avaient la volonté – réaliste ou pas – de rester durablement en Belgique ; c’était le premier critère d’intégration ! Ensuite par rapport à leur demande de régularisation en tant que demandeurs d’asile, c’était un critère apprécié.

Beaucoup d’entre eux arrivaient en famille et leurs enfants apprenaient plus vite que leurs parents !

 

– Et après cette « étape belge » ?

Direction la France où j’ai suivi mon conjoint qui partait travailler dans le sud-ouest dans la région d’Arcachon. C’était alors la première fois que nous vivions en France.

Nous y sommes restés environ cinq ans et demie et là, j’ai pu exercer au sein d’une autre association ; l’Union des familles laïques et j’y ai travaillé surtout dans l’animation et la coordination d’une école des devoirs. On a monté le projet en l’animant avec des bénévoles.

 

– Qu’as-tu fait par la suite ?

Re-direction l’Italie et cette fois-ci à Turin pour presque cinq ans encore. À Turin, j’ai travaillé au Lycée Français International Jean Giono qui dispose de classes allant de la maternelle à la terminale. Cet établissement accueille environ 700 élèves parmi lesquels, au moins 70 % d’élèves italiens. Pour le reste, ce sont un bon 10 % d’enfants nés dans des couples franco-italiens et enfin des enfants d’expatriés venus d’Europe ou d’ailleurs.

– Dans quelles classes y as-tu enseigné ?

J’y ai enseigné majoritairement dans les classes du primaire, et un peu en classe de 6e surtout dans des projets de lecture.

 

– Après cette « étape italienne » ?

Retour en France en Lorraine où je me suis rapprochée du rectorat de Nancy-Metz. Les quatre premières années, j’ai effectué des remplacements en collège (à Damvillers en Meuse, à Audun-le-Roman ou encore à Herserange…) et depuis la rentrée de 2020, je suis affectée au Lycée Darche.

 

– Mais le retour à une « certaine réalité du terrain » avec des postes occupés dans des petits collèges de la région n’a-t-il pas été « difficile », après un tel parcours professionnel effectué à l’étranger et aussi « exotique » ?

Non, je n’ai pas trouvé, c’était une décision davantage personnelle que professionnelle de revenir aux racines. Lorsqu’on prend une décision, on l’assume en se disant qu’on a fait le bon choix. Le principe est de s’adapter (rires) !

 

– Avec le recul de toutes ces années passées à enseigner à l’étranger, à différents publics, qu’est-ce que ce parcours professionnel multiple et varié t’a apporté en matière de pédagogie ?

Toutes ces expériences m’ont apporté de la souplesse et de l’adaptabilité, mais ces aspects ne sont pas propres à la pédagogie ! J’ai acquis la conviction qu’on a tous des richesses à cultiver et à entretenir. L’interculturalité n’est pas une évidence dans le sens où l’on pense à un véritable dialogue entre des individus porteurs d’une histoire… Quels que soient les publics, passer du multiculturel à l’interculturel constitue un véritable défi !

 

– Tu es une grande lectrice, aurais-tu un ou plusieurs livres à nous conseiller ?

J’aime beaucoup l’écrivain espagnol Carlos Ruiz Zafón qui a écrit la trilogie : Le Cimetière des livres oubliés mais en marge de cette œuvre, il a aussi publié à l’attention de jeunes adultes ou adolescents. C’est tout un imaginaire qui se déroule à Barcelone durant les périodes franquiste et postfranquiste.

– As-tu des hobbies ?

J’aime bien bouger, voyager, préparer les circuits de A à Z. Cela me fait m’évader, que ce soit dans une grande ville ou bien un endroit particulier de nature, une exposition ou autre… J’aime bien la Méditerranée et les États-Unis.

 

– Tu es arrivée chez nous en septembre 2020, avais-tu déjà entendu parler de notre lycée ?

J’en avais entendu parler un peu en arrivant dans la région, et j’y avais passé une journée dans le cadre d’une formation portant sur les nouveaux programmes de français au collège et j’avais alors déjeuné au restaurant du Petit Vauban (rires).

 

– À présent que tu es « dans nos murs », que représente notre établissement à tes yeux ?

C’est l’idée pour moi qu’il n’y a pas d’étiquettes. Ainsi, en arrivant au Lycée Darche, j’ai été surprise par le grand nombre d’élèves n’ayant pas obtenu le Brevet des Collèges mais aussi par le véritable potentiel de bon nombre d’entre eux qui vont ici se révéler… et qui obtiendront leur bac ! Cela me pose beaucoup de questions.

Je te remercie vivement d’avoir bien voulu accepter l’invitation à cet entretien. Une bonne continuation à toi !

 

 

 

Visuels Internet, mise en page,

 photographies, entretien préparé et propos recueillis par

 Jean-Raphaël Weber, les 4 et 23 février 2022